sábado, 8 de mayo de 2021

nicanor della rocca de vergalo / tres poemas

En el bosque

*

Mignonne, iremos por los bosques, iremos
A colmarnos de esperanza y nos dormiremos.
Impregnado de perfumes exquisitos de tu aliento,
Quiero, solo contigo, cosechar la mejorana,
Y, lejos de los ruidos del hombre indiscreto y cambiante,
Ver en el fondo del lago blanco a la luna de ojos de plata
Elevarse, y de súbito perfilar en las ramas
Viejos castaños verdes y suaves formas blancas
¡Oh ven! Embriaguémonos de silencio y de flores.

Sueños vírgenes, doblen la punta negra de los dolores;
Y tú, sonríe y canta, ¡oh mi Rosa de ultramar!
Los días sombríos, vencidos, se doblegan ante la luz.

¡Oh, bello bosque! ¡Oh, ruiseñores cantores!
Mignonne, embriaguémonos de todos los aromas
De la reseda, de los muguetes blancos, de la hierba doncella,
Y solos, bajo los montes, llamaremos a nuestra revancha.
¡Querida, escucha! Allá arriba, en las frescas ramas verdes,
Un ruiseñor improvisa versos para nosotros,
Y cuando nos callamos muy rápido, él vuelve a cantar.
¿Quieres que nos cantemos este suave romance?
Él creería que nos reímos y nos aprovechamos de su canto.
Corramos más bien tras esas extensas mariposas
Azules y moteadas de blanco, silfo que a nadie toca
Y dame un beso muy fuerte en la boca.

~

Los ruidos invisibles

*

Al S. Exc. M. J. M. de Goyeneche.

Inclinado sobre el océano de las cosas,
El corazón del hombre oye de vez en cuando
Gritos, llanto sin fin, voces
Cuyas causas no conoce.

Neblinas del alma donde la razón
Se pierde en el fondo y se subleva,
Las ilusiones que se cosechan
Nacen en los cielos en floración.

¡Feliz quien se digna a escuchar
Los ruidos diversos que no ve,
Pues lo Invisible tiene sus encantos
Para el alma en pena y el corazón tierno!

Humildes suspiros de nobles remeros
Perdidos en la mar, yo os escucho,
Y, tranquilamente, prosigo mi ruta
En el océano lleno de rumores.

~

Mañana

*

Al poeta François Coppée

Estaré muerto, estaré
En la tumba y descompuesto,
Sirviendo a los gusanos de alimento,
A los gusanos voraces y sin dientes.

¿Esto será para no nacer más?
¿En el fondo de la eterna noche
Escucharé todavía el ruido
Secreto que quisiera conocer?

¿Ebrio hasta nunca de los gratos acuerdos
De lo Desconocido, mi alma altiva
Sobrevivirá toda entera
A los huesos incompletos de mi cuerpo?

No sé nada, es un misterio.
Libre, sin embargo, de todo remordimiento,
Te deseo, horrible muerte,
¡Oh muerte leal y bienhechora! 

***
Nicanor della Rocca de Vergalo (Lima, 1846-Argelia, 1919)
Versiones de Jim Alexander Anchante Arias

/

Dans les bois

*

(Au poète Armand Silvestre)

Mignonne, nous irons dans les bois, nous irons
Nous abreuver d’espoir et nous y dormirons.
Imprégné des parfums exquis de ton haleine,
Je veux, seul avec toi, cueillir la marjolaine,
Et, loin des bruits de l’homme indiscret et changeant,
Voir au fond du lac bleu la lune aux yeux d’argent
Se lever, et soudain profiler dans les branches
Des vieux marronniers verts ses douces formes blanches.
Oh ! viens ; enivrons-nous de silence et de fleurs.

Rêves vierges, doublez le cap noir des douleurs ;
Et toi, souris et chante, ô ma Rose trémière !
Les jours sombres, vaincus, rampent dans la lumière.

Oh, la belle forêt ! oh, les ruisseaux chanteurs!
Mignonne, enivrons-nous de routes les senteurs
Du réséda, des muguets blancs, de la pervenche,
Et seuls, dans les taillis, prenons notre revanche.
Chère, écoute ! là-haut, dans les frais rameaux verts,
Un rossignol pour nous improviser des vers,
Et quand nous nous taisons bien vite il recommence.
Veux-tu que nous chantions cette douce romance ?
Il croirait qu’on en rit et que nous le pillons.
Courons plutôt après ces larges papillons
Bleus tachetés de blanc, sylphe que nul ne touche,
Et donne-moi bien fort un baiser sur la bouche.

~

Les bruits invisibles

*

A S. Exc. M. J. M. de Goyeneche.

Penché sur l’Océan des choses,
Le cœur de l’homme entend parfois
Des cris, des pleurs sans fin, des voix
Dont il ne connaît pas les causes.

Brouillards de l’âme où la raison
S’égare à fond et se révolte,
Les illusions qu’on récolte
Naissent aux cieux en floraison.

Heureux celui qui daigne entendre
Les bruits distincts qu’il ne voit pas,
Car l’Invisible a des appas
Pour l’âme en peine et le cœur tendre!

Humbles soupirs des fiers rameurs
Perdus en mer, je vous écoute,
Et, calme, je poursuis ma route
Dans l’Océan plein de rumeurs.

~

Demain

*

Au poète François Coppée

Je serai mort, je serai dans
La tombe et dans la pourriture
Servant aux vers de nourriture,
Aux vers voraces et sans dents.

Sera-ce pour ne plus renaître ?
Au fond de l’éternelle nuit
Entendrai-je encore le bruit
Secret que je voudrais connaître ?

Ivre à jamais des doux accords
De l’Inconnu, mon âme altière
Survivra-t-elle tout entière
Aux os incomplets de mon corps ?

Je n’en sais rien, c’est un mystère.
Exempt, pourtant, de tout remord,
Je te désire, affreuse mort,
O mort loyale et salutaire !

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