jueves, 23 de febrero de 2023

agota kristof / dos poemas










Lentamente, él se acostumbraba...

*

Lentamente, él se acostumbraba a que ella dejara, olvidara cosas
en su casa.
Cerillos, un pañuelo cuando lloró, una
bufanda de sus hijos, sus guantes, sus anteojos a veces.
Él, en general, dormía cuando ella se iba, estaba cansado.
Sabía que ella se quedaba ahí, en su casa, fumando cigarrillos y
                                       [pensando en Dios sabe qué.
Por la mañana descubría los objetos olvidados.
Ella no dejaba de olvidar y dejar cosas en su casa.
Su brasier.
Sus cigarrillos.
Su encendedor, un libro para niños.
Su estuche de anteojos
Sus sandalias
(De seguro regresaba descalza)
Sus pañuelos
Su cabello, sobre todo su cabello
Estaba por todos lados, su cabello
En la almohada, en el cuarto de baño, en la cocina.
Una verdadera pesadilla.
Su cabello negro, en todas partes, en todo el departamento.
La última vez, olvidó sus manos.
Dos manos sin anillos, posadas sobre el borde de la mesa,
inmóviles, sangrando un poco en los puños donde ella las había
cercenado.

~

No morir

*

No morir
todavía no
demasiado pronto el cuchillo
el veneno, demasiado pronto
Todavía me amo
Amo mis manos que fuman
que escriben
Que sostienen el cigarrillo
La pluma
La copa.
Amo mis manos que tiemblan
que limpian a pesar de todo
que se mueven
Las uñas todavía crecen
mis manos
acomodan los anteojos en su sitio
para que yo escriba.

***
Agota Kristof (Csikvánd, 1935-Neuchâtel, 2011)
Versiones de Alejandro Oliveros
/

Lentement, il s'habituait...

*

Lentement, il s'habituait à ce qu'elle laissât, oubliât des choses
chez lui.
Des allumettes, un mouchoir quand elle avait pleuré, une
écharpe de ses enfants, ses gants, ses lunettes parfois.
Lui, en général, il dormait quand elle partait, il était fatigué.
Il savait qu'elle restait là, chez lui, à fumer des cigarettes et à
penser à Dieu sait quoi.
C’est le matin qu'il découvrait les objets oubliés.
Elle ne cessait pas d'oublier et de laisser ses affaires chez lui.
Son soutien-gorge.
Ses cigarettes.
Son briquet, un livre d'enfant,
Son étui à lunettes
Ses sandales
(Elle devait rentrer à pieds nus)
Ses mouchoirs
Ses cheveux, surtout ses cheveux
Il y en avait partout, de ses cheveux
Sur l'oreiller, dans la salle de bain, dans la cuisine.
Un véritable cauchemar.
Ses cheveux noirs, partout, dans tout l'appartement.
La dernière fois, elle avait oublié ses mains.
Deux mains sans bagues, posées sur le rebord de la table,
immobiles, saignant un peu aux poignets où elle les avait 
sectionnées.

~

Pas mourir

*

Pas mourir
pas encore
trop tôt le couteau
le poison, trop tôt
Je m'aime encore
J'aime mes mains qui fument
qui écrivent
Qui tiennent la cigarette
La plume
Le verre.
J'aime mes mains qui tremblent
qui nettoient malgré tout
qui bougent
Les ongles y poussent encore
mes mains
remettent les lunettes en place
pour que j’écrive

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